L'Européos
Parallèlement, en vue d’une unité culturelle européenne, le Parlement vota une loi fin 2007 sur la nouvelle langue européenne : des centaines de professeurs ès Lettres et spécialistes européens de linguistique furent appelés à plancher sur le projet. Si l’anglais restait une base solide, ils avaient ordre de l’enrichir de vocabulaire européen et d’adapter la grammaire aux besoins phonétiques de certaines Régions, tout en simplifiant les orthographes et réduisant considérablement le nombre d’exceptions, de mots invariables et de verbes irréguliers. Le programme prévoyait qu’en cinq ans, des centaines de milliers de professeurs de cette langue baptisée Européos devaient donner leurs premiers cours au plus jeune âge, et qu’en deux générations la population européenne parlerait cette même langue d’un bout à l’autre de l’Europe. Les premiers enseignants avaient pour tâche de faire de l’Européos une langue à coefficient égal à la langue régionale dès le primaire : ainsi en dix ans l’Europe voyait sa première génération parfaitement bilingue. L’engouement pour cette langue nouvelle provoqua de nombreuses créations de sites Internet et de cours particuliers, encouragées par les campagnes de popularisation qui en firent un véritable phénomène de mode.
Altérations de mots existants et extension de l’alphabet
Certains mots furent cependant modifiés pour devenir propres à l’Européos. Initialement ce ne devait être le cas que d’un seul nom : Europe. L’orthographe variant d’une langue régionale à l’autre, les linguistes travaillant sur une langue européenne eurent pour consigne de créer un mot générique qui ne soit pas identique à celui d’une langue européenne existante pour éviter un favoritisme involontaire. Ce fut finalement en utilisant les terminaisons les plus courantes, le « a » et le « e » (Europa, Europe…) que fut créé le mot Europæ, où ces terminaisons furent fusionnées, comme symbole de l’Européos qui devait unir les langues européennes et permettre aux citoyens des Etats Unis d’Europe de se comprendre dans chaque branche de la Rose des Vents. Suivant cette règle, le caractère « æ », couramment utilisé en danois ou en islandais, fut utilisé dans d’autres mots et devint une lettre courante de l’alphabet Européos. La lettre æ devint rapidement une sorte de logo pour l’Européos, comme l’@ symbolise internet. Ainsi, dans les abréviations de documents officiels, (Æ) indique que l’information se doit d’être rédigée en Européos.
Une fois le principe de l’intégration d’un nouveau caractère parfaitement intégré, il fut appelé à être réemployé dans le cadre de la simplification de l’Anglais. L’exemple le plus marquant et qui divisa bien des Européens lors de l’introduction de la Langue Commune fut l’intégration des lettres islandaises þ (Þ) et ð (Ð), qui remplacent tous deux le « th » anglais qui peut être prononcé de deux façons différentes.
La lettre þ (majuscule : Þ) correspond en islandais au son de This, plus proche d’un Z.
La lettre ð (majuscule : Ð) correspond en islandais au son de That, plus proche d’un D.
A cause de l’intégration de mots d’autres langues, certains sons jusque là absents de l’Anglais Référence ont dû être intégré comme le son « j ». La lettre « j » étant prononcé « dj » en anglais, « r » en espagnol, plus ou moins « i » dans la plupart des autres langues européennes, etc., les Français durent se forcer à adopter le ж(Ж), lettre prononcée « j » dans les langues régionales Serbe et Russe. Paradoxalement, énormément de mots Français intégrés à l’anglais ont nécessité des modifications pour éviter la confusion sur la prononciation de la lettre « j », comme avoir une impression de « deжa-vu » ou pour parler de musique ou de cinéma, aimer un « жenre ». Un autre mot d’origine française intégré au russe est utilisé en Européos avec l’orthographe russe du son « j » : Massaж.
L’introduction de nouvelles lettres prêtait à débat mais l’objectif était de rendre la langue aussi facile à apprendre que possible, en rapprochant le plus possible la prononciation de l’orthographe, et donc en limitant au maximum les confusions. L’Européos tente de donner à chaque son sa propre orthographe, autant que faire se peut, tout en ne changeant pas trop radicalement l’Anglais Référence déjà largement pratiqué en Europe. Il est toutefois à noter qu’il était largement approximativement pratiqué en Europe avant l’Européos, et les simplifications ont bien souvent été basées sur les erreurs courantes que les Européens utilisaient déjà comme des règles officieuses.
Intégrations de mots européens
Dans certains cas, des mots qui n’avaient jamais été convenablement traduits en anglais, ou trop approximativement, furent intégrés dans leur langue d’origine ( mais orthographiés selon les règles de l’Européos). Dans le domaine des couleurs, par exemple, le mot d’origine grecque galasios exprime ce que la plupart des langues traduisent simplement par un vague « bleu clair », et le mot sini d’origine russe exprime lui un bleu nuit (On dit par exemple que le sini est la couleur officielle du drapeau européen). Certaines transformations furent plus drastiques pour les raisons de simplification, par exemple le mot allemand Sehnsucht, exprimant à la fois la nostalgie et le mal du pays, est devenu Sænsurt. Le mot russe « Жal » signifiant « dommage », plus concis et laconique que « it’s a pity / It’s a shame », a également été rapidement intégré. « Aitsu !», du basque, est une façon guère polie d’attirer l’attention sur le fait qu’on a quelque chose à dire et que tout le monde serait bien avisé de se taire et d’écouter. Evidemment, ce genre d’invective a rapidement trouvé son succès !
Simplifications :
Invariables et Irréguliers
Le pluriel est toujours écrit et prononcé en Européos. La liste des mots invariables a été drastiquement réduite, et des mots comme monþ (ex month) ou fish se doivent désormais d’être écris et prononcés monþes et fishes. De même les pluriels irréguliers furent simplifiés comme mans, womans, childs…
Les verbes irréguliers ont également été simplifiés avec la conjugaison en « ed » et beaucoup de verbes courant comme buy, conjugué bought, sont désormais conjugués buied au passé.
Les anciennes formes furent naturellement tolérées durant la première décade de l’introduction de l’Européos mais les professeurs eurent ensuite tendance à durcir les corrections après un rapport parlementaire insistant sur la lenteur présumée de cette introduction. De plus, de nombreuses listes de quotas furent créées sur le nombre de mots irréguliers ou invariables que devrait contenir l’Européos, et certains mots furent régulièrement retirés puis réintroduits au gré des protestations du corps enseignant. En 2033, certaines personnes âgées utilisent toujours les formes anglaises, la majorité de la population ayant pris le pli de cette nouvelle conjugaison ( Exception faite des Régions Anglaises et Irlandaises ).
Les chiffres
Poussant le principe de facilitation de l’apprentissage, certains chiffres ont été modifiés pour supprimer quelques exceptions à la logique générale. Ainsi, ten (10) devint-il onety sur le modèle de twenty (20), thirty (30), etc. Ainsi, 11 et 12 deviennent onety-one et onety-two, et de 13 à 19 les terminaisons en « een » sont supprimées au profit de la logique commençant à 20. Eighteen (18) devient par exemple onety-eight, évitant la confusion fréquente à l’oral avec eighty (80).
Fautes, eurodialectes, exceptions et Langues Régionales
Evidemment, beaucoup de fautes et d’erreurs sont propres à chaque Région en raison de l’ancrage centenaire des langues régionales, créant ce qui est officiellement classé comme des eurodialectes, c’est à dire des versions populaires de l’Européos.
Il est également à noter que certaines exceptions subsistent, notamment dans les noms propres qui restent inaltérés pour la plupart. Certains prénoms possèdent désormais des orthographes différentes, selon que les parents choisissent d’intégrer les nouvelles lettres ou pas. Dans le domaine des noms, ce n’est pas obligatoire. D’autres exceptions ont pour origine des mots intégrés employant des sonorités exclues de l’Européos (comme les sons nasaux), mais en nombre insuffisant pour mériter une lettre spécifique.
Pour les noms de localités (villes, régions, pays, etc.) Les panneaux ou tout document officiel ou informatif, se doivent d’indiquer toujours leur orthographe en Européos d’abord, puis dans la langue régionale. Si la Région possédait plusieurs langues officielles avant la Fédération, c’est la langue majoritairement parlée qui l’emporte dans la représentation linguistique régionale dans la Constitution Européenne. Mais dans ce cas, les précédentes langues officielles non-retenues peuvent toujours être inscrites comme « Langues Régionales Officielles » dans les constitutions régionales, et les citoyens peuvent exiger de recevoir leurs documents administratifs en Européos doublé de n’importe quelle langue officielle selon les statuts régionaux. Toutefois, il leur est bien souvent demandé de répondre en Européos.
La langue comme interface sociale : Les pronoms personnels
Parmi les éléments ajoutés à l’Anglais Référence, on notera l’introduction de la possibilité de vouvoiement. Cependant, seul le pronom personnel « yœ » distingue le vouvoiement du tutoiement « you », la conjugaison restant identique comme l’est déjà celle du « he » et du « she » qui ne distinguent le masculin du féminin que par le pronom. Cette mesure fut introduite afin de pouvoir marquer sa politesse, sa déférence, sa distance, son respect, et fut particulièrement suivie dans l’Européos populaire, intensivement utilisée dans l’environnement scolaire, le monde du travail, etc. Il n’en fut pas de même pour la possibilité de ne pas distinguer le masculin du féminin en se contentant de distinguer les Hommes ( en utilisant « hæn » au singulier et « Þæn » au pluriel) et les objets ou animaux (en utilisant « it »), comme en Finnois ou Estonien. Cette possibilité devait permettre à terme de réduire les inégalités entre hommes et femmes dans le monde de l’emploi et la politique, et la législation européenne impose, par exemple, à tout règlement ou titre (en médecine, politique, enseignement, etc.) d’employer la formule asexuée. Pourtant, en dehors des écrivains, d’associations égalitaires et de quelques journalistes zélés, peu de citoyens européens emploient cette règle que beaucoup critiquent pour son approximation et sa dépendance au contexte, préférant le système il/elle, majoritairement employé dans les langues régionales, ce qui explique en partie sa popularité.
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